Les jouets sont-ils sexistes?
Oui, les jouets sont sexistes.
Savez-vous pourquoi votre fils n’a aucune envie de jouer à la poupée et votre fille ne veut pas recevoir une tractopelle pour son anniversaire ? Voici la réponse : les jouets sont sexistes. Les caractéristiques des jouets d’aujourd’hui ne sont pas faites pour convenir en même temps aux filles et aux garçons car les fabricants de jouets ont fait en sorte de donner un sexe aux jouets. Pourquoi ? la réponse est simple : l’argent et le bien-être de votre enfant ne rentre absolument pas en ligne de compte.
Pourquoi les fabricants ont-ils donné un sexe aux jouets?
Cette tendance de jouets sexués existe seulement depuis les années 90 (nous vous en disons plus après) et les fabricants distinguent désormais les jouets « pour filles » et les jouets « pour garçons » car cela leur permet de doubler leur chiffre d’affaires dans chaque famille. Puisque les jouets sont sexués, ils peuvent moins se transmettre d’un enfant à l’autre sauf s’ils sont du même sexe. Vous devez donc acheter un jouet pour chaque enfant de sexe différent.
Selon les fabricants, la séparation des jouets par le sexe de l’enfant est un service rendu aux parents pour qu’ils puissent se repérer dans plus de 12.000 de références de jouets sur les sites internet ou les magasins spécialisés : le meilleur moyen de vous orienter dans le magasin est de vous offrir un espace de vente facile à comprendre. Vous n’avez alors qu’à vous diriger vers les jouets « pour garçons » sans perdre du temps à regarder les jouets « pour fille » qui ne plairont pas, à dessein, à votre fils. Il serait nécessaire de classer les jouets par sexe pour aider les parents à s’y retrouver, ils risqueraient sinon d’acheter le « mauvais jouet ».
Le « mauvais jouet » est celui qui n’est pas prévu pour le sexe de l’enfant, comme un camion de pompier pour une petite fille. En effet, en achetant ce jouet, vous n’aurez pas besoin d’en racheter un autre pour son petit frère. Sous le prétexte de faciliter vos achats (en dépensant plus d'argent au passage), les marketeurs vous imposent leur vision des jeux dédiées aux filles comme aimer le repassage, les poupées et les jouets en rose. Cela a évidemment un impact négatif sur le développement des capacités et des compétences des filles et des garçons.
Peut-on classer les jouets autrement que selon le sexe?
Certains diront : « oui mais si on ne classe pas les jouets par sexe, comment fait-on pour s’y retrouver ? ». Avant les années 90, les jouets n’étaient pas classifiés « pour filles » ou « pour garçons », ils étaient classifiés par âges et/ou par centres d’intérêts : jouets de construction, jouets d’imagination, jouets créatifs, jeux d’imitation etc.
Par exemple, dans les années 60, les boites de jeux représentaient les jouets de manière mixte, avec au moins un enfant de chaque sexe sur la boîte.
Par ailleurs, à ceux qui pensent que les enfants sont naturellement plus attirés par un type de jouet selon leur sexe, nous répondons que cela est l’œuvre de Dame Culture et non pas de Dame Nature. Aucun jouet n’est « pour les filles » ou « pour les garçons », à moins que ce jouet nécessite d’utiliser ses organes génitaux, mais dans ce cas ce n’est pas un jouet pour enfant. C’est le discours des marchands et de la société qui assigne un sexe à un jouet ou à des activités.
En effet, tous les enfants, quel que soit leur sexe, ont les mêmes capacités cognitives en naissant, et leurs goûts (notamment en matière de jouets) s’affirment en fonction de leur environnement et de ce qu’ils voient. Or, les catalogues de jouets et les publicités font tout pour que les filles comprennent qu’elles ne doivent pas jouer avec des jouets bleus qui sont des camions, des kits de bricolage ou des jeux de construction. Si les filles ne réclament pas ces jouets, ce n’est pas parce qu’elles ne les aiment pas, mais parce qu’elles ont compris qu’on attendait d’elles qu’elles ne jouent pas avec.
Comment le marketing a-t-il rendu les jouets sexistes?
Grâce à un marketing agressif déversé dans les catalogues de jouets, les rayons dans les magasins et des publicités à la télévision, les garçons voient que les autres garçons aiment le bleu (et uniquement le bleu) et jouent avec des jouets « pour garçons ». Idem pour les filles, mais avec du rose. Par un mécanisme de mimétisme, les filles et les garçons comprennent qu’ils doivent se comporter et jouer avec les mêmes jeux que ces filles ou ces garçons dans les catalogues et à la télévision.
Par ailleurs, dans les magasins, les jouets « pour filles » et les jouets « pour garçons » sont clairement séparés géographiquement. Les illustrations des boîtes de jouets indiquent pour quel sexe est destiné le jouet en question : une petite fille qui joue à la marchande, un petit garçon qui regarde dans son microscope, une petite fille en robe de princesse, un petit garçon déguisé en pompier. Même si en en France en 2019 un pompier sur six est une femme, il est difficile d’inciter une petite fille à vouloir un déguisement de pompier quand il est présenté dans les allées des jouets pour garçons, que la boîte est bleue ou rouge et qu’elle met en scène un petit garçon.
L’accumulation de ces signaux (le rose, les paillettes, les licornes et les princesses contre le bleu, la science, la combativité et les guerriers) crée un conditionnement chez les enfants et chez les parents : le rose c’est pour les filles, le bleu c’est pour les garçons. C’est par ce conditionnement que le marketing des fabricants a réussi à « donner un sexe » aux jouets.
Y a-t-il quelqu’un pour sauver les jouets?
Pouvez-vous compter sur la crèche ou la maternelle pour que votre enfant joue avec des jouets pour lesquels il n’a pas été conditionné ? Non, car l’industrie du jouet a réussi un vrai tour de force psychologique en imposant cette segmentation des jouets dans l’esprit des parents et des professionnels de la petite enfance. Vous pourrez donc entendre à la crèche un adulte dire à une fille : « Laisse les camions, le coin avec les jouets pour les filles est ici où tout est rose. Tu vois ? C’est facile de s’en rappeler, les jouets pour toi sont roses. »
Conscient du problème, le gouvernement a rédigé une Charte des Jouets Mixtes. Cette charte est non contraignante et est constituée de vœux pieux. Les fabricants ne sont pas obligés de s’y soumettre et très peu le font.
Vous devez donc vous montrer très attentif pendant les premières années de votre enfant afin qu’il ne soit pas victime de ce conditionnement car les jouets destinés à un seul sexe ne développent que certaines qualités chez votre enfant. Si votre fille ou votre fils n’a que des jouets « de son sexe », alors elle ou il est privé de l’opportunité de développer des compétences qui sont acquises grâce aux jouets de l’autre sexe.
Pour une première approche visant au déconditionnement du rose/bleu de votre enfant, nous vous recommandons ce livre :
C’est l’histoire d’un catalogue de jouets qui voit ses pages mélangées. Les jouets « de filles » se retrouvent au milieu de jouets « de garçons ». Ce livre vous permettra de faire comprendre à votre enfant qu’il a le droit de choisir des jouets qui ne sont pas « de son sexe». Les illustrations sont en plus très jolies.
Au fait...
Saviez-vous que dès l'âge de 6 ans, la plupart des filles pensent être moins intelligentes que les garçons?
C'est le résultat d'une enquête menée par des chercheurs en 2017.