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Aurélie Gonin

Podcast avec Liv Sansoz: Plus Tard Je Serai Guide de Haute Montagne

Avant de faire partie des 2% de femmes guides de haute montagne, Liv Sansoz est une championne d'escalade et une amoureuse de la montagne et de la verticalité. Dans cette interview, découvrez les expériences et les conseils de Liv Sansoz pour devenir guide de haute montagne mais aussi pour donner le meilleur de vous-même, persévérer et atteindre des sommets!

Résumé du podcast

00:14 Présentation de Liv Sansoz. Liv a 45 ans et sa discipline historique est l’escalade. Elle a été championne de France, championne d’Europe, et championne du monde deux fois et trois fois vainqueur de la coupe du monde.

00:37 Record du monde. L'Office du Tourisme Suisse a organisé la tentative de record du monde de la plus grande cordée féminine sur un sommet de 4000 mètres. Le 17 juin 2022. Liv Sansoz faisait partie de la vingtaine de femmes guides de haute-montagne qui ont encadrées la cordée de 80 femmes venues de tous horizons pour grimper le Breithorn. Cette cordée a réussi à gravir le sommet et donc à décrocher le record mondial de la plus grande cordée féminine. L'exercice a été un réel challenge car la plupart des femmes de la cordée ne connaissaient rien à l'alpinisme, certaines venaient même de pays où elles n'avaient jamais vu la neige! Ont notamment fait partie de l'expérience la musicienne et Miss France 2019 Vaimalama Chaves, l'actrice suédo-norvégienne Eva Röse, la Thaïlandaise Cindy Sirinya Bishop, ambassadrice de bonne volonté d'ONU Femmes ou encore la chanteuse de R'N'B suisse Naomi Lareine. Les guides dont Liv faisait partie ont organisé une journée d'entraînement avant de s’attaquer au sommet pour permettre à ces femmes d’apprendre les rudiments de l’alpinisme.

02:53 Présentation du métier de guide de haute montagne par Liv Sansoz. Un guide de haute montagne emmène toute personne qui souhaite aller en montagne et qui n’a pas les connaissances ni les compétences d'alpinisme nécessaires à l'ascension et la descente en sécurité du sommet projeté. C'est un métier très varié carl'été l'activité tourne autour de l’alpinisme comme l'ascension du Mont-Blanc, de voies d'escalade, de traversée d'arêtes ou de goulottes. En hiver, le guide de haute montagne emmène des personnes en ski, hors-piste ou non, en station ou en ski de randonnée pour partir n'importe où dans la montagne. Par ailleurs, un guide utilise un tas de matériel et de techniques différentes. Un Guide de haute-montagne peut aussi emmener ses clients en hiver grimper des cascades de glace avec des crampons et des piolets. Parfois les sorties durent plusieurs jours. Par exemple l'ascension du Mont blanc se fait en 2 ou 3 jours avec des nuits en refuge. Il arrive aussi à Liv Sansoz d'emmener des clients en raid à ski pendant cinq jours, une semaine, tout dépend du projet.

05:42 L'examen probatoire pour devenir guide de haute montagne. Le métier de guide de haute montagne est un métier réglementé qui nécessite de suivre une formation particulière. Liv Sansoz explique que la formation dure quatre ans mais pour pouvoir intégrer cette formation, il faut envoyer un dossier qui prouve que le candidat ou la candidate a déjà effectué toutes les ascensions, les voies d'escalade, les sorties à ski et les sorties en montagne figurant sur la liste établie par l'Ecole Nationale de Ski et d'Alpinisme (ENSA). Cette liste se trouve ici https://www.ensa.sports.gouv.fr/sites/default/files/2022-02/Nouvelle%20liste%20probatoire_juillet_2021_DT_formulaire-avec%20compression.pdf Pour cela, les différentes courses de la liste doivent être réalisées sur un minimum de trois ans avec le candidat en tête de chaque course pour au moins 50% des longueurs. Liv explique que la période minimum de trois ans pour faire les courses est obligatoire et que l'ENSA refusera un candidat qui aura fait toutes les courses l'année précédant sa candidature car il est important que le candidat ait passé suffisamment de temps en montagne. Une fois que l'ENSA a validé la liste de courses envoyée par le candidat, il peut se présenter à l'examen d'entrée qui se compose de deux épreuves. Une épreuve à ski et une épreuve d'été. L'épreuve de ski consiste en une montée rapide en peau de phoque avec une descente libre où sont évalués l'aisance, le style et la fluidité. Une fois l'épreuve de ski réussie, le candidat ou la candidate peut se présenter à l'épreuve d'été qui est constituée de sous-épreuves avec de l'escalade, de la grimpe sur glace, une course d'orientation chronométrée et une épreuve de terrain varié. Toutes les épreuves d'été visent à évaluer l'aisance, l'agilité et la rapidité du candidat ou de la candidate dans les différents milieux montagneux. A l'issue des épreuves d'été et d'hiver, la candidate ou le candidat passe la "semaine montagne" qui consiste en cinq jours en montagne avec des formateurs qui évaluent si les résultats aux épreuves d'été et d'hiver correspondent aux compétences de la candidate ou du candidat sur le terrain de montagne. Après la réussite de ces épreuves qui correspondent à l'examen d'entrée, la formation de guide de haute montagne peut être intégrée.

09:23: La formation pour devenir guide de haute montagne. Cette formation dure un peu moins de quatre ans et commence en septembre de l'année d'obtention de l'examen d'entrée dont les dernières épreuves se terminent en juillet. La formation consiste en quatre semaines de stage en septembre avec des formateurs et des formatrices qui enseignent les techniques de base, l'encadrement en escalade et la gestion d'une cordée en montagne. Suivent ensuite quatre semaines de ski en janvier pour apprendre la nivologie, savoir ce qui déclenche les avalanches et comment lire le terrain. Pendant ces quatre semaines, une semaine est dédiée à des sorties avec des cobayes qui sont des volontaires pour faire du ski de randonnée encadré par des stagiaires guides. Les stagiaires guides doivent les emmener en montagne comme si les cobayes étaient de vrais clients, en présence des formateurs et des formatrices qui complètent la formation et assurent la sécurité. A la fin de ces quatre semaines de ski, commence un nouveau module de formation en juin avec deux semaines de formation et deux semaines avec des cobayes. Liv Sansoz explique qu'elle a beaucoup aimé les modules avec les cobayes car cela permet de vraiment prendre conscience du métier de guide de haute montagne qui a un inconnu au bout de sa corde auquel il faut parfois tout apprendre. Elle explique que c'est très différent que de partir en montagne avec des amis. Après ce module de formation en juin, le ou la stagiaire guide de haute montagne devient aspirant ou aspirante. Ce statut permet de commencer à emmener des gens en montagne avec des restrictions sur les difficultés des voies. Avant de pouvoir se présenter à l'examen final, un ou une aspirante doit faire un certain nombre de courses avec des clients ainsi que des courses techniques seul-e pour montrer que le niveau est toujours au plus haut. Liv Sansoz explique que ces courses (qui prennent du temps) sont une sorte de contrôle continu entre le statut d'aspirant et la fin de la formation. A l'issue de ces nouvelles courses il faut suivre un nouveau module de formation concentré sur la glace pendant une semaine. L'année suivante, l'aspirant peut passer l'examen final pour devenir guide de haute montagne. Une fois passé l'examen d'entrée qui est le plus dur, Liv Sansoz estime que 90% des candidats vont devenir guides de haute montagne (sans compter les accidents ou les décès).

13:21 Un métier à risques. Au cours de la formation de guide de haute montagne, Liv estime qu'il y a environ deux personnes dans chaque promotion qui sera victime d'un accident grave qui peut parfois mener au décès. Elle insiste sur le fait qu'il s'agit d'un métier à risques.

13:36 Combien de femmes guides de haute montagne. Liv Sansoz donne la statistique de 2% de femmes guides de haute montagne en France. Elle explique que ce n'est pas plus dur pour une femme de devenir guide de haute montagne. Une femme n'est pas moins forte qu'un homme et elle est tout à fait capable de faire une voie d'escalade, de s'orienter dans le brouillard, de mener à bien une cordée au sommet du Mont Banc ou d'une montagne plus technique. Liv Sansoz explique donc ces 2% de femmes guides de haute montagne par d'autres facteurs. Pendant très longtemps il y a eu très très peu de femmes guides et cette absence de femmes dans la profession créé une barrière psychologique. Liv Sansoz constate que depuis 6 ou 7 ans de plus en plus de femmes se présentent à l'examen d'entrée pour devenir guide de haute montagne et cela incite les jeunes femmes à oser. Liv Sansoz pense néanmoins qu’il n'y aura jamais un très grand nombre de femmes guides de haute montagne car le métier est dur physiquement car il faut parfois se lever très tôt et porter un sac à dos aussi lourd que celui des hommes car il contient le même matériel. Par ailleurs, il n'est pas toujours facile d'organiser sa vie de famille en tant que femme guide si on n'a pas un conjoint qui fait sa part du travail domestique.

16:25 Quelle force physique pour devenir guide de haute montagne? D'après Liv Sansoz tous les physiques peuvent devenir guide de haute montagne. Elle insiste sur le fait qu'une femme peut faire tous les métiers. Même les petits gabarits peuvent porter les gros sacs à dos car l'entraînement permet de préparer son corps à porter toutes les charges, à être endurante et à supporter le froid. Liv Sansoz a remarqué que les hommes ne parlent pas de la même manière de la montagne que les femmes. Elle imagine qu'un homme se laisse moins impressionner devant une paroi alors qu'une femme va plus être dans la réflexion pour préparer son ascension. Liv explique que les hommes sont naturellement plus forts que les femmes mais cela n'empêche pas les femmes de gravir elles aussi le Mont Blanc. Elles auront peut-être fait l'ascension en quatre heures au lieu de trois pour un homme mais le sommet est atteint et c'est ça l'objectif. Elle constate que sur des passages techniques, les femmes s'en sortent généralement mieux que les hommes. Liv Sansoz rejoint Anaïs Caradeux quand elle dit qu'il ne sert à rien de comparer les femmes aux hommes car tout le monde fait les choses différemment. Les femmes doivent arrêter de vouloir faire comme les hommes, qu'elles fassent comme elles veulent! Liv Sansoz travaille parfois avec son conjoint qui est lui aussi guide de haute montagne et ils abordent le métier différemment l'un de l'autre. Avec de la communication, les approches différentes de chacun enrichissent l'expédition et l'expérience des clients. Par ailleurs, les guides femmes rendent le métier plus sûr car le fait que des femmes soient guides de haute montagne créé une hétérogénéité dans le métier qui est bénéficiaire. En effet, des études ont démontré qu'avoir des points de vue différents dans un groupe permettait de prendre de meilleures décisions. Liv Sansoz abonde dans ce sens en ajoutant que ce serait dommage de se priver des femmes guides.

22:49 Championne d'escalade. Avant de devenir guide de haute-montagne, Liv Sansoz est une championne d’escalade avec beaucoup de médailles et de nombreux exploits à son actif. En 2022, il n’y a que quelques femmes dans le monde qui ont réussi à grimper une voie classée 8c+ et Liv a été la deuxième. Une voie 8c+ est l’une des plus dure car il n’existe que 5 autres niveaux de difficulté plus élevés. Par exemple, il n’existe que 2 voies 9c dans le monde et aucune 9c+. Liv explique que si elle a tenté et réussit à gravir une 8c+ c'est parce que Josune Bereziartu l'a fait avant elle. Elle explique que voir une femme réaliser cet exploit a fait tomber une barrière mentale chez elle et elle a compris qu'elle aussi pouvait grimper une 8c+, comme les hommes. Liv a d'ailleurs fait cette voie pour encourager d'autres femmes à tenter ces niveaux de difficulté. Liv explique que quand quelqu'un brise une barrière psychologique, cela ouvre la porte à plein d'autres femmes. Elle remercie d'ailleurs les grimpeuses qui ont ouvert la voie avant elle car si elles ne l'avaient pas fait, elle ignore si elle aurait fait des tentatives de grimpe de ces voies d'exceptionnelle difficulté. Liv ajoute que cette expérience lui a appris une leçon de vie qui est de toujours essayer ce qui semble dur car on peut y arriver. On se sous-estime toujours et c'est la raison pour laquelle il faut toujours tenter des défis qui paraissent trop dur, car on peut très bien les réussir. L'échec c'est de ne pas essayer et ne pas tenter c'est l'échec de la vie.

28:50 L'importance de s'entourer d'une bonne équipe. En 2001 Liv Sansoz a tenté de grimper une nouvelle voie 8c+ (qui n'avait été grimpée que par un seul homme jusqu'ici) dans un contexte assez particulier car son ascension devait être filmée par une équipe de tournage. Liv était très bien préparée et elle savait qu'elle allait réussir à grimper cette nouvelle voie 8c+. Toutefois, ses amis qui l'assuraient habituellement ont dû partir et Liv s'est retrouvée sans personne pour l'assurer. Elle propose à l'équipe de tournage de repousser l'ascension de quelques jours le temps qu'elle retrouve quelqu'un pour l'assurer mais un caméraman lui indique qu'il n'est pas obligatoire d'attendre, car sa femme s'y connaît en escalade et peut l'assurer pour éviter de tomber si jamais elle lâche une prise. Liv Sansoz avoue qu'à l'époque elle était jeune et qu'elle ne s'est pas suffisamment posé la question des compétences de la personne qui l'assurait. Liv parvient à grimper cette fameuse voie 8c+ mais, la personne qui était censée l'assurer et la redescendre doucement jusqu'au sol a lâché la corde. Liv a fait une chute de 15 mètres et s'est gravement blessée aux vertèbres. Elle estime tout de même avoir eu beaucoup de chance car cet accident aurait pu lui coûter la vie ou la clouer dans un fauteuil roulant. Cet accident lui a causé un grand traumatisme psychologique car elle n'arrivait plus à faire confiance aux personnes qui l'assuraient. Liv Sansoz a donc arrêté de grimper pendant une période pour prendre le temps de faire revenir la confiance. En compensation, elle a commencé à faire du parapente, de la chute libre et même du base jump qui consiste à sauter dans le vide du haut d'une falaise avec un parachute pour l'ouvrir avant de toucher le sol. Liv appelle cela une thérapie par l'action pour l'aider à dépasser sa peur d’être lâchée par les gens qui l'assurent.

35:01 Tenter de nouvelles disciplines. En tentant le parapente, le base jump et l'ULM, Liv reconnaît que c'est très inconfortable de débuter dans une nouvelle discipline en étant totalement débutante alors qu'elle cumule plus de 50 podiums internationaux en escalade. Elle explique qu'à 45 ans elle ne peut plus pratiquer l'escalade à son niveau d'antan mais qu'elle est une amoureuse de la vie et qu'elle adore apprendre de nouvelles disciplines. A tel point qu'elle apprend aujourd'hui le wing foil qui est une discipline proche de la planche à voile où le sportif peut parfois s'élever à plusieurs mètres au-dessus de l'eau. Liv admet qu'elle vit des grosses chutes dans l'eau, que parfois elle a envie de jeter la planche tant elle ne comprend pas ce qu'il faut faire, mais elle adore se retrouver dans la peau d'une débutante et se dire "il faut que je reparte à zéro". Ces nouvelles disciplines permettent d'apprendre sur soi et de se remémorer tout ce qu'on sait faire dans la vie, ses expériences pour les diriger vers la nouvelle activité pour apprendre à la maitriser. Liv Sansoz pense que tout le monde peut tout apprendre. Elle explique par exemple qu'elle n'a jamais fait de surf, mais elle sait que si elle s'y met elle rencontrera des difficultés la première semaine et après elle y arrivera. Elle a confiance en la capacité de tout le monde à apprendre à partir du moment où les efforts nécessaires sont fournis.

37:21 L'éthique de la montagne et la persévérance. En 2017 Liv Sansoz décide de se lancer un nouveau défi: grimper la totalité des 82 sommets de plus de 4 000 mètres des Alpes françaises, italiennes et suisses, sans utiliser les remontées mécaniques, toutes les approches devant se faire à pied. Pour chaque ascension elle était accompagnée d’un binôme très aguerri et elle termine cette aventure en septembre 2018 avec l’ascension du Mont Blanc. Lors de cette aventure, Liv s'est parfois retrouvée dans des situations délicates comme lors de l’ascension du Aletschhorn en Suisse. Liv explique qu'elle avait enchaîné l'ascension de presque 30 sommets de 4000 mètres en 30 jours et qu'elle était dans « petit » un état de fatigue avant de s'attaquer à l'Aletschhorn. Le jour de l'ascension, la météo était très très froide et Liv sent qu'elle transpire beaucoup, notamment des pieds mais elle poursuit son ascension avec con équipe. Elle explique qu'à un moment elle se décale pour observer le sommet et évaluer les voies de passage, et elle tombe jusqu'à la taille dans une crevasse cachée par un pont de neige et se tape très violemment le genou dans la glace. Malgré la douleur, Liv décide de continuer jusqu'au sommet en boîtant un petit peu. A partir de ce moment, elle explique qu'elle oublie de continuer à bouger ses orteils pour lutter contre le froid, il fait - 25°c. Une fois arrivée au sommet, l'équipe amorce la descente en ski mais Liv s'aperçoit que sa douleur à la jambe est trop intense et qu'elle mettrait l'équipe en danger en poursuivant la descente sur une seule jambe. Elle décide donc d'appeler les secours qui viennent la chercher en hélicoptère. Une fois arrivée à l'hôpital, Liv s'aperçoit qu'elle a deux orteils gelés et une déchirure musculaire au mollet. Elle s’en remet et malgré cette expérience, elle décide de refaire l'ascension de ce même sommet pour remplir intégralement son défi. Liv estime qu'avoir monté l'Aletschhorn sans le redescendre en ski c'est comme ne pas l'avoir monté du tout. Elle explique qu'il y a une éthique dans l'alpinisme qui veut qu'on ne puisse pas dire qu'on a monté un sommet si on ne l'a pas redescendu.

45:11 Gérer les blessures. Entre 2011 et 2009 Liv Sansoz enchaînes les blessures : fracture du sacrum, fracture de la cheville, nerf sciatique abîmé, fracture du talon, fracture des vertèbres, fracture du poignet, ménisque abîmé, puis l’épaule, fracture de l’autre talon et une commotion cérébrale. Malgré cela elle sait qu'elle peut revenir à un très haut niveau. Pas à son plus haut niveau quand elle enchaînait les podiums, mais à un niveau tout de même excellent. Liv Sansoz explique qu'une blessure ne va pas l'arrêter et ne va pas l'empêcher d'aller en montagne. Sa passion est telle qu'elle a toujours tout fait au niveau de la rééducation et de la réhabilitation pour pouvoir continuer à vivre sa passion. Liv ne pense pas avoir une constitution particulièrement robuste par rapport à la plupart des gens mais elle estime qu'il est indispensable d'avoir une bonne hygiène de vie pour que le corps puisse se régénérer plus facilement. Dormir suffisamment, éviter le stress et bien manger sont des facteurs déterminants pour éviter les blessures ou pour s'en remettre plus facilement. C'est la raison pour laquelle Liv indique qu'elle n'est pas du tout handicapée par ses accidents passés. Toutefois, l'âge avançant, elle n'exclut pas de se remettre moins biens de d'hypothétiques blessures à l'âge de 55 ans par exemple.

49:30 Gestion des risques. Dans l’épisode du podcast avec Anaïs Caradeux qui est une championne de ski freestyle, Anaïs explique qu’en tant que monitrice de ski, elle s’aperçoit qu’avant 10-12 ans les enfants réagissent à la peur et à la prise de risque en fonction de leur personnalité et pas en fonction de leur sexe. Mais elle dit qu’à partir de l’adolescence, la société, l’école, la télé a appris aux filles à avoir peur et aux garçons à ne pas dire qu’ils ont peur. Liv Sansoz explique qu'il est important d'avoir peur parce que c'est ce qui sauve parfois la vie. Toutefois, quand on est dans l'action, il ne faut pas se laisser envahir par son imagination ou sa peur car il faut vraiment se concentrer sur ce qu'il faut faire. Liv insiste sur le fait qu'il y a des risques en montagne et qu'en partant en montagne il faut accepter ces risques, surtout ceux qu'on ne peut pas contrôler, comme les chutes de pierre ou les chutes de sérac. Il faut se concentrer sur les risques qu'on peut éviter en prenant les bonnes décisions en contournant un terrain qui paraît trop instable par exemple. Liv précise qu'il faut accepter les risques incontrôlables sinon il ne vaut mieux pas aller en montagne. Elle admet beaucoup réfléchir, essayer d'anticiper un maximum mais la montagne n'est jamais comme on la prévoit et c'est pour cela qu'il faut savoir s'adapter, se réorganiser, être flexible et c'est ce qu'aime Liv.

54:11 Tout le monde peut-il devenir guide de haute montagne? Liv Sansoz explique que le métier n'est pas fait pour ceux qui ont peur de la montagne ou qui ne sont pas suffisamment passionnés par cet environnement pour fournir les efforts nécessaires à l'obtention du diplôme.

55:14 Les clients sont-ils plus en confiance avec une femme guide de haute montagne? D'après Liv Sansoz, les femmes guides de haute montagne sont plus conservatrices en termes de risques que les hommes. Elle pense savoir qu'en France, aucune femme guide n'a eu d'accident dans sa profession à ce jour. Chaque année il y a un certain nombre d'accidents lors de sorties avec des guides de haute montagne et aucun de ces accidents ne concernait de femmes guides. Liv précise que certains clients hommes sont réticents à l'idée d'avoir une femme guide car elle n'aura peut-être pas la force pour les retenir s'ils tombent. Elle indique que cela peut être vrai et qu'il est nécessaire pour une femme guide de choisir ses clients en fonction du poids qu'elle peut supporter. Toutefois, Liv entend plus généralement que les clients font confiance aux guides femmes. Les clientes sont d'ailleurs plus à l'aise avec des femmes guides et elle donne l'exemple d'une cliente qu'elle a eu récemment et qui avait un problème avec sa natte de cheveux. La cliente et Liv en ont rigolé toutes les deux alors qu'un guide homme aurait probablement perdu patience. A la fin de la sortie, la cliente a déclaré à Liv que partir avec une guide femme était vraiment mieux car elle se sentait comprise. Liv explique aussi que certains hommes préfèrent partir avec des femmes car ils sont moins bousculés et se sentent en totale confiance. Elle n’a pas rencontré de cas où un client ne lui faisait pas confiance parce qu'elle était une femme, en revanche elle a déjà été confrontée à l'incrédulité et à la condescendance de certains guides hommes. Elle prend l'exemple d'une fois où elle emmenait un groupe de 3 femmes et, alors qu'elles chaussaient leurs skis pour descendre l'Aiguille du Midi qu'elles venaient de grimper, un homme aborde une des clientes de Liv pour la mettre en garde sur la dangerosité de la descente. La cliente de Liv lui répond que tout va bien car elle est avec une guide et désigne Liv du doigt. L'homme a été interpellé et très surpris car il n'avait jamais envisagé que la femme du groupe avec sa petite combinaison bleue soit guide de haute montagne.

01:00:29 Les exploits des femmes en montagne. Liv Sansoz s'avoue très chanceuse de vivre à Chamonix où elle peut côtoyer et partir en course avec de nombreuses femmes très fortes ayant une très belle énergie. Elle dit que ce milieu est magnifique et porteur, il n'y a qu'à voir le record du monde battu le 17 juin 2022 où elle a mené avec d’autres guides une cordée de 80 femmes au sommet du Breithorn, ou le 2 juillet 2022 quand 16 femmes alpinistes ont emmené aussi au sommet du Breithorn Nicole Niquille, la première femme guide de Suisse qui se déplace désormais en fauteuil roulant. Cela été possible grâce à un siège de voiture de course fixé sur un snowboard qui a été réalisé gratuitement par l’entreprise lucernoise Orthotec (ce siège est d'ailleurs maintenant à disposition des différentes associations qui proposent du sport-handicap). Les alpinistes ont tiré Nicole Niquille sur plus de 4000 mètres à la force des mollets avec des harnais conçu pour les chiens de traîneau. Liv se rappelle aussi qu'en 2013, avec Marion Poitevin notamment, elles ont aidé une amie paraplégique à la suite d'un accident en montagne à grimper la paroi d'El Cap dans le parc de Yosemite aux Etats-Unis. Cette aventure s'est faite malgré une fermeture du parc et donc en secret des autorités. Liv a raconté l'intégralité de l'aventure sur son site: https://livsansoz.net/2013/10/24/el-cap-a-bout-de-bras/. Avec tous ces exemples, elle est persuadée que les femmes ont quelque chose de plus ou de différent à apporter à la profession de guide de haute montagne.

01:02:55 La culture de l'effort et l'illusion des réseaux sociaux. Liv Sansoz ajoute que c'est en partie grâce aux réseaux sociaux que de plus en plus de femmes viennent en montagne car elles voient d'autres femmes le faire. Toutefois, elle indique que les réseaux ont tendance à faire croire que, du jour au lendemain, on peut gravir des montagnes alors qu'il faut des années d'expérience pour arriver au niveau requis pour faire certaines voies. Elle insiste sur le fait que pour arriver à un objectif, il y a d'abord du travail, des efforts et de la préparation. Pour tout dans la vie il y a un effort à fournir et Liv Sansoz regrette que l'on perde la culture de l'effort. Elle affirme à toutes les jeunes filles que tout est possible à condition de se préparer, de s'entraîner et de fournir des efforts. Le métier de guide de haute montagne ne s'achète pas, il faut fournir des efforts pour l'obtenir.

01:05:41 Le leadership en montagne. Liv explique qu'avec des clients, son statut de guide de haute montagne doit faire autorité et c'est avec ce statut qu'elle s'impose auprès d'eux. C'est elle qui prend les décisions et elles doivent être suivies. Avoir ce leadership et cette autorité est plus délicat pour Liv quand elle part avec des gens qui ne sont pas ses clients dans une cordée mixte. Maintenant elle arrive à dire qu'elle veut passer en tête et qu'elle en est capable mais il y a une dizaine d'années elle restait en retrait. Désormais elle n'hésite plus à dire quand elle veut passer en tête.

01:08:07 Il ne faut pas avoir peur d'être musclée. Liv Sansoz n'a pas rencontré de jeune fille qui, dans un souci esthétique, craignait de développer sa musculature pour devenir guide de haute montagne. Elle explique que les jeunes qui veulent faire ce métier sont tellement motivées que les considérations esthétiques liées à la musculature ne sont jamais un problème. Être guide de haute montagne est un métier passion pour lequel il faut aimer la montagne et si on aime la montagne, on se fiche de l'esthétique de son corps, le plus important est que l'on puisse compter dessus.

01:09:52 La prochaine invitée du podcast? Liv souhaiterait entendre Marion Haerty qui a gagné plusieurs coupes du monde en snowboard freeride.