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Podcast avec Anaïs Caradeux: Plus Tard Je Serai Championne de ski freestyle

Dans cette interview, découvrez le parcours d'Anaïs Caradeux, championne de ski acrobatique et surfeuse. Anaïs vous livre ses conseils pour persévérer dans votre passion et faire partie des meilleures.

Résumé du podcast

00:16 présentation rapide du parcours d'Anaïs Caradeux, championne de ski acrobatique (Halfpipe) et explication de la discipline

2:00 Anaïs revient sur sa première expérience aux JO de Sotchi et sur les difficultés qu'elle y rencontre. Notamment sa blessure précédente aux X Games qui la déstabilise et des conditions de compétition loins d'être idéales. Anaïs explique que sa chute lors des JO de 2014 est liée à différents facteurs mais qu'elle sait qu'elle peut mieux faire aux Jeux suivants 4 ans plus tard. Pendant ces 4 années, son entraînement n'est pourtant pas optimal et son genou, mal opéré ne lui permet pas de retrouver son meilleur niveau lors des Jeux de Pyongcheng en 2018.

5:15 Anaïs nous explique ce qu'elle a retiré de ses 2 participations aux Jeux Olympiques et les raisons pour lesquelles elle aurait mieux fait de ne pas aller à sa deuxième Olympiade. Anaïs évoque que si sa persévérance a pu l'aider à ne nombreuses reprises dans sa carrière, cela l'a poussée à participer à ces deuxièmes JO pour prendre sa revanche. Elle indique toutefois qu'avec du recul, elle aurait mieux fait de ne pas y aller. Une autre raison de sa participation est sa peur de l'avenir sans le sport. Anaïs révèle que les Jeux Olympiques de 2018 étaient un peu une fuite en avant car ne pas les faire impliquait de se demander ce qu'elle voulait faire de sa vie, loin du monde du sport et de son univers. Anaïs explique qu'elle a appris qu'il fallait choisir ses batailles et que toutes ne méritaient pas d'être menées même si cela conduit vers un futur inconnu.

8:43 Anaïs nous parle de sa vision de l'échec et de son importance pour progresser sportivement. Elle nuance toutefois en expliquant que toutes les difficultés ne sont pas forcément nécessaires.

10:00 Malgré les difficultés qu'elle a rencontrées en ski half pipe, Anaïs explique comment la peur de l'échec ne l'empêche pas de tenter de nouveaux challenges. Elle indique que le fait d'apprendre de nouvelles disciplines comme le surf ou le parapente est une joie car elle le fait pour elle et pas pour d'autres personnes qui s'attendent à ce qu'elle atteigne certains objectifs. Le surf a été une bouée de sauvetage pour Anaïs quand elle ne pouvait plus skier à cause de son genou. Apprendre cette nouvelle discipline lui a permis de reprendre confiance en elle. Anaïs insiste sur le fait que continuer à appendre à faire de nouvelles choses est une gymnastique qu'il faut garder et travailler tout au long de sa vie.

12:05 Anaïs explique que sa motivation vient du fait qu'elle apprend à être fière de ses petites victoires et de ses petits apprentissages. Même si elle régresse parfois, elle se rappelle qu'elle a déjà progressé et qu'elle progressera encore. Elle insiste sur le fait qu'il faut fêter ses petites victoires car cela donne la motivation nécessaire pour continuer dans une tâche difficile. Anaïs explique aussi qu'il faut accepter que la progression ne soit pas une ligne continue et qu'il peut y avoir des hauts et des bas.

14:46 Anaïs indique qu'en France on n'a pas l'habitude d'entendre de la part des athlètes qu'ils ont connu des difficultés, qu'ils ont dû travailler dur et cela laisse à penser que c'est facile et que si on n'y arrive pas tout de suite, on n'y arrivera jamais. Anaïs explique que seule la répétition permet de s'améliorer. L'important est de ne pas abandonner quand on est en bas.

15:54 Anaïs explique les raisons qui l'ont poussées à mettre fin à sa carrière en half pipe et pourquoi cette décision lui a demandé beaucoup de courage. En prenant sa retraite, elle a quitté le seul monde qu'elle connaissait et s'engageait dans l'inconnu. Elle a perdu son identité de "championne" et elle a dû travailler sur elle-même pour découvrir qui elle était en dehors du monde du ski.

19:08 Anaïs explique comment elle est venue dans le back country et comment elle a réussi à se motiver pour tout réapprendre. Elle décrit comment elle a eu besoin de se lancer de nouveaux défis et comment la progression est son moteur. C'est aussi pour ça qu'aujourd'hui elle prend un nouveau départ en devenant monitrice de ski. Anaïs regrette qu'on ne dise pas assez aux gens que les essais ne sont pas toujours couronnés de succès mais que ce n'est pas grave. L'échec ne réside pas dans la non atteinte des objectifs mais dans l'abandon et l'absence d'efforts. Anaïs explique qu'elle n'est pas motivée par la facilité mais qu'il ne faut pas viser un objectif trop ambitieux dès le départ. Ce sont les petits progrès au fur et à mesure qui sont motivants.

23:27 Soutien de la famille. Anaïs revient sur la dévotion de ses parents pour qu'elle puisse pratiquer son sport et notamment sur leur déménagement à La Clusaz pour qu'elle puisse s'entraîner. Toute la famille avait pour objectif qu'Anaïs réussisse dans le sport. Cela a parfois pu poser des difficultés quand la ligne entre parents et coaches est devenue un peu floue. Anaïs revient aussi sur le fait que son premier club ne l'a pas forcément accueillie à bras ouverts car elle était la seule fille et l'encadrement craignait que cela perturbe l'équilibre des garçons. L'intégration s'est finalement bien passée car les effets de l'adolescence ne s'étaient pas encore faits sentir. En poursuivant sa carrière, Anaïs a été confrontée à son propre coach qui lui a conseillé de laisser tomber la discipline. Une fois dans l'équipe de France, elle ne s'est pas sentie soutenue par les garçons de l'équipe mais elle est parvenue à trouver des soutiens aux Etats-Unis.

28:29 prise de risque. Les parents d'Anaïs ne lui ont jamais interdit de pratiquer des sports dangereux à partir du moment où elle prenait toutes les précautions. Le fait de pratiquer de nombreux sports lui a donné le goût de la compétition. Les parents d'Anaïs ne lui ont jamais dit que quelque chose était impossible et ils ne lui ont jamais transmis leur peur. En tant que monitrice de ski, Anaïs constate qu'énormément de parents apprennent à leurs enfants à avoir peur alors qu'ils n'avaient pas peur au départ. Il faut enseigner aux enfants quels moyens mettre en place pour minimiser les risques plutôt que de leur apprendre la peur.

35:37 Anaïs souligne également que la société, les parents, la télévision, les livres pour enfant apprennent plus aux filles qu'aux garçons à avoir peur. Elle constate que jusque 10-12 ans les filles et les garçons expriment leur peur de la même manière: certains ont peur et d'autres non indépendamment de leur sexe. Mais dès la pré-adolescence, Anaïs voit que les garçons qui ont peur ne le disent plus et cela les mets en danger. A l'inverse, les filles qui n'avaient pas peur ne tentent plus certains exercices. Cet apprentissage de la peur par les filles est très insidieux et se fait progressivement.

38:13 Anaïs explique d'où vient son esprit de compétition. Elle constate que les filles ne sont pas assez encouragées à développer leurs points forts car seuls leurs points faibles sont remarqués. Les garçons bénéficient d'un effet Pygmalion où, en leur disant dans quoi ils sont bons, ils s'améliorent encore plus dans ce domaine, alors que les filles font face à un effet Golem car en leur disant uniquement qu'elles sont faibles dans un domaine, elles vont s'en persuader et se saborder dans ce domaine. Anaïs estime avoir été chanceuse d'être poussée dans le domaine où elle était forte.

40:40 Anaïs évoque ses blessures et l'impact qu'elles ont eu sur son mental et ses performances. Elle explique comment cela lui a permis de faire un travail sur elle-même où elle a pu se réapproprier sa propre valeur sans la faire dépendre de ses performances et du regard des autres.

43:43 Anaïs revient sur le rôle des modèles et l'absence de femmes dans sa discipline. Elle explique qu'elle a choisi le half pipe car elle était la seule fille dans les autres catégories (Big Air et Slopestyle). Elle ne pouvait se confronter à personne dans ces catégories, certes, elle gagnait, mais surtout parce qu'elle était la seule à concourir dans sa catégorie. Elle a voulu se mettre au half pipe pour pouvoir se confronter aux autres skieurs. Anaïs explique que les filles ont dû se battre pour pouvoir accéder à certains sports et les pionnières ont même dû se déguiser en hommes pour participer à certaines compétitions et prouver qu'elles pouvaient faire su ski freestyle. Elle estime qu'elle a tout gagné si une jeune fille vient la voir pour lui dire qu'elle a été une inspiration et que son parcours l'a encouragée à poursuivre dans sa voie.

48:27 Anaïs discute de l'évolution du nombre de filles dans les sports de glisse.

49:17 Nous parlons de l'intérêt des catégories hommes / femmes dans le ski et Anaïs indique que les corps sont différents et que les deux catégories sont pertinentes. Elle ajoute que le sport pratiqué par les femmes ou par les hommes est différent mais également intéressant: les hommes iront plus vite et plus haut mais les femmes seront plus souples et plus précises. Les techniques utilisées par les hommes et les femmes sont complétement différentes. Anaïs explique que les femmes ont commencé le freestyle 10 ans après les hommes et c'est la raison pour laquelle les figures exécutées par les hommes et les femmes sont différentes: les femmes en sont là où étaient les hommes il y a 10 ans. Elle estime que c'est la génération actuelle qui va faire exploser le niveau des femmes en freestyle. Anaïs explique également que le nombre de pratiquants dans un sport accélère la montée de niveau. Plus il y a de pratiquants, plus il y a de performances qui tirent les autres vers le haut. Or, il y a peu de filles en ski freestyle.

52:10 Discussion sur le manque d'égalité des chances dans le sport entre hommes et femmes. Anaïs explique qu'il est difficile d'exiger des femmes les mêmes performances que les hommes car elles sont arrivées plus tard dans le circuit et elles ne bénéficient pas des mêmes avantages matériels: gains réduits, moins bonnes conditions dans les compétitions car elles skient après les hommes dans le sillage des traces, des cailloux et des bosses qu'ils ont laissés... La comparaison des performances n'est pas possible tant que les conditions ne seront pas égalitaires. Anaïs explique aussi qu'il est normal que les filles reçoivent les mêmes gains que les garçons car pour arriver à X résultat, elles s'investissent et s'entraînent autant que les hommes. C'est également le cas pour le surf où, encore récemment, les épreuves féminines se déroulaient entre deux marées quand les vagues étaient moins bonnes, les grosses vagues étant réservées aux épreuves masculines. Dans ces conditions, la comparaison des performances n'a aucun sens. Anaïs explique qu'il faut faire évoluer cette mentalité en se battant. Elle a notamment refusé de prendre le départ de certaines épreuves quand les conditions étaient trop dégradées, voire dangereuses. Pour cela, elle estime que les femmes doivent se serrer les coudes car "se tirer dans les pattes" ne sert qu'aux hommes. C'est aussi un comportement qui est encouragé par les sponsors et les marques car habituellement, ils ne prennent qu'une seule femme par sport pour le représenter alors qu'il y a toujours plusieurs hommes pour ce même sport. Pour garder leurs sponsors, les filles étaient donc incitées à évincer les nouvelles arrivées. Anaïs explique qu'il est indispensable d'apprendre aux filles à être solidaires et à s'encourager entre elles. Cela vaut dans tous les domaines, que ce soit dans le sport, au travail ou dans les groupes d'amis où il peut y avoir plusieurs filles parmi les garçons. Anaïs explique aussi que les filles doivent se battre avec leurs propres armes, et pas celles imposées par les garçons: si tu es moins forte en vitesse qu'un garçon, n'essaie pas d'aller plus vite que lui mais montre-lui que tu es plus technique et endurante que lui pour finir par prendre le dessus. Il faut laisser tomber les critères créés pour les hommes et inventer un environnement favorable aux femmes.

1:00:57 Anaïs explique comment, à ses débuts en back country, elle a voulu montrer aux femmes qu'il était possible de recommencer dans un domaine, de se tromper, de persévérer pour ensuite y arriver. Cela n'est pas réservé à l'élite. Elle dit que les femmes doivent arrêter de se mettre elle-même des barrières en anticipant un éventuel échec qui n'arrivera jamais et, s'il arrive, cela veut juste dire qu'on peut encore progresser. Anaïs ne comprend pas qu'avant même d'essayer, certains disent "ah non, ça va être trop dur pour moi". Il faut avant tout essayer au lieu de se poser des barrières. Notamment la barrière de l'âge est souvent un prétexte à ne pas essayer quelque chose de nouveau alors qu'il n'y a aucune raison ! Anaïs rappelle que ne pas être bon dans un nouveau sport tout de suite ne veut pas dire qu'on est mauvais, cela veut seulement dire qu'on vient de commencer. Certaines personnes lui ont déjà dit qu'elle ne skiait pas aussi bien qu'une skieuse alpine et elle leur répond "Evidemment, je ne me suis jamais entraînée à faire du ski alpin". Anaïs veut inciter les filles à tenter de nouveaux défis même en l'absence d'objectifs de compétition, rien que pour la fierté ressentie une fois le défi relevé, même si on rate. Elle insiste sur le fait que les efforts et le travail, même s'il ne paie pas toujours immédiatement, permet toujours de s'améliorer, et pas seulement en sport mais aussi dans le milieu du travail. C'est pour cela qu'il ne faut pas se mettre de barrière avant d'avoir essayé de faire quelque chose car, le travail, l'entraînement et la répétition donneront des résultats et aucune barrière n'est infranchissable, d'autant plus si elle est imaginaire. Il faut trouver son point fort et le travailler à fond !

1:03:40 Anaïs nous dévoile qui elle souhaiterait voir interviewer dans le prochain épisode du podcast: Johanne Defay et Justine Dupont. Il s'agit de deux surfeuses aux parcours différents mais tout aussi intéressants dont tout le monde a à apprendre.